Comme l'indique le titre, nous allons mettre les pieds dans la partie technique de la grammaire latine, mais comme toujours, pas de panique.
Pour traduire un texte latin, il ne suffit pas de connaître du vocabulaire, il faut aussi et surtout comprendre comment se construisent les phrases. Pour rappel, une phrase se compose d'une ou plusieurs propositions (groupe de mots de la phrase organisé autour d’un verbe) : l'indépendante, la principale ou subordonnée. Si ces termes ne vous sont pas familiers, je vous recommande le cours sur les propositions de mon collègue, car ce sont des notions importantes. Comme nous l'avons dit dans l'Avant-propos, la maîtrise de la grammaire française est indispensable a la compréhension de la grammaire latine pour ne pas perdre pied. Pour en revenir aux propositions, en latin, elles sont généralement liées et délimitées par un coordonnant (mais, ou, et donc, or, ni, car) ou un subordonnant (que, qui, lorsque...). Et ce sont ces petits mots qu'il faut repérer en version pour construire les phrases. Bien sûr, ce serait trop facile si tous les types propositions répondaient à la même construction.
Dans cette partie, il s'agira donc d'apprendre deux types de propositions courantes, mais techniques : la proposition infinitive et la proposition à l'ablatif absolue.
Avant de comprendre comme elle se structure, rappelons en quoi elle consiste. La proposition infinitive est tout d'abord une proposition subordonnée, car elle est nécessairement introduite par une autre proposition dont elle vient compléter un élément (verbe/nom). En français, elle correspondrait à peu près donc à une subordonnée complétive. Ensuite, sa caractéristique est que son verbe est à l'infinitif et son sujet est à l'Accusatif.
Comment la repérer ?
Comme nous l'avons dit, elle est toujours introduite par une principale dont le verbe peut être un verbe de déclaration (dire, affirmer, annoncer,...) ou de perception (voir, penser, juger,...). Attention : Il arrive qu'elle soit introduite par nom qu'elle vient développer. Exemple : Il donne un ordre à savoir qu'il faut avancer. > "à savoir qu'il faut avancer" vient préciser l'ordre en question, donc en latin ce serait une proposition infinitive.
Donc, dès que vous voyez un verbe de perception/déclaration ou un nom exprimant la même chose, vous pouvez vous attendre à trouver une proposition infinitive. Ensuite, il faut regarder la suite de la phrase. La particularité de la proposition infinitive est que son verbe est à l'infinitif. Si, à la suite de votre verbe de déclaration/perception, vous trouvez un verbe à l'infinitif qui n'a pas d'autres raisons d'être là (s'il n'est pas le sujet ou s'il n'est pas introduit par un autre verbe) il est fort probable que vous ayez trouvé le verbe principal de votre proposition infinitive. Enfin, le sujet de ce verbe doit être à l'Accusatif, donc encore une fois, s'il y a un Accusatif qui ne peut pas être COD du verbe introducteur, c'est sûrement son sujet. Donc les conditions pour être sûr(e) que vous êtes face à une proposition infinitive sont : verbe de déclaration/perception + Accusatif + Infinitif.
Exemple : Avem cantare audio > Avem (oiseau) = Acc / Cantare (chanter) = Inf / audio (entendre) = vb de perception
Avant de voir les traductions possibles, il est important de noter que :
- Si le sujet est à l'Acc, cela veut dire que son attribut (adjectif, participe, nom) le sera également.
- Le verbe de la proposition infinitive peut avoir un ou plusieurs compléments, cela veut dire que vous pourrez trouver un ou plusieurs mots à l'Accusatif et l'un d'entre eux sera le sujet et le reste sera le COD.
Dans les deux cas, pour trouver le sujet il suffit de tester les différentes possibilités et de choisir la plus cohérente.
Comment la traduire ?
Il y a deux façons de les traduire qui dépendent du contexte. Vous l'aurez peut-être deviné, mais pour l'exemple ci-dessus "avem cantare audio" la traduction la plus naturelle et intuitive serait "j'entends l'oiseau chanter". C'est l'une des façons de faire qui convient le plus souvent pour les propositions courtes et simples. En revanche, quand la construction est plus complexe, il vaut mieux passer par une subordonnée complétive. C'est-à-dire, qu'il faut traduire le verbe à l'infinitif comme un verbe conjugué et introduire la proposition avec le subordonnant "que". Exemple : Avem cantare audio > J'entends que l'oiseau chante.
D'ailleurs, si vous faites le choix de la complétive, il faut bien faire attention au temps, car en latin il existe 3 types d'infinitif : l'infinitif passé, l'infinitif présent, l'infinitif futur. Il faut donc conjuguer le verbe au temps voulu.
Cette proposition est un peu plus complexe à comprendre que la précédente, mais elle est tout aussi commune, il faut donc la connaître. Si elle est paraît complexe c'est parce qu'elle est plus difficile à repérer et plus difficile à traduire que la précédente. Avant de nous lancer là-dedans, il faut d'abord rappeler que cette proposition correspond en français à la proposition subordonnée circonstancielle. Elle donne des précisions quant au contexte dans lequel se déroule la phrase.
Comment la repérer?
Contrairement aux autres, cette proposition n'est jamais introduite, elle a évidemment une principale, mais il n'y a généralement pas de marqueur qui l'en distingue. Il arrive parfois qu'elle soit marquée par une virgule, en incise ou en début de phrase, mais ce n'est pas systématique. Ensuite, comme son nom l'indique, il est question d'ablatif. Dans cette proposition, le sujet sera toujours à l'ablatif et son verbe sera un participe à l'ablatif. A ce stade, nous n'avons pas encore vu comment se construit le participe, mais tout comme en français ce n'est pas un mode que l'on considère comme conjugué. Les verbes au participe ne se conjuguent pas, ils se déclinent. Pour le moment, ce qu'il faut retenir c'est que dans la proposition à l'ablatif absolu, sujet et verbe sont à l'ablatif. Il arrive qu'il y est des compléments, mais elles sont généralement brèves. En conclusion, s'il y a dans une phrase un nom à l'ablatif suivi d'un participe à l'ablatif, il y a de grandes chances que ce soit une proposition à l'ablatif absolu.
Comment la traduire?
Paradoxalement, la traduction de cette proposition est à la fois simple et compliquée. Comme elle est difficile à repérer, il arrive qu'on prenne son sujet et son verbe comme de simple ablatif complément circonstanciel et il arrive que les traduire comme tels fonctionne. Mais cela reste peu courant contrairement à l'autre possibilité. Comme nous l'avons vu plus haut, cette proposition sert à donner les circonstances dans lesquelles se déroule l'action principale, or elles peuvent être temporelles ou causales (les plus courantes).
Dans un premier temps, je vous recommande de passer par des participes Exemple : Romulo regnante > Romulus régnant / Partibus factis > Les parts ayant été faites. De cette façon, il vous sera plus simple de saisir la nuance circonstancielle. Le contexte aide également Exemple : Romulo regnante, puer eram > Lorsque Romulus régnait, j'étais enfant / Partibus factis, partem meam inveni > parce que les parts étaient faites, j'ai trouvé ma part..
Attention : le verbe "être" n'a pas de participe, il est sous-entendu si les Latins le jugent évident, donc il peut y avoir des propositions à l'ablatif absolu sans verbe à première vue Exemple : me puero, Augustus regnabat > Quand j'étais enfant, Auguste régnait.